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De Legba à Erzulie: Guide des dieux et déesses du vodou haïtien

L’esprit vodou Agaou
Photo: Verdy Verna

De Legba à Erzulie: Guide des dieux et déesses du vodou haïtien

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Entrez dans le monde mystique du vodou haïtien, où des dieux puissants règnent en maîtres. Du guerrier féroce Ogoun à la mère aimante Erzulie, ces divinités sont vénérées et honorées par les pratiquants depuis des siècles. Mais au-delà des représentations hollywoodiennes de zombies et de possessions en transe, se cache un riche patrimoine culturel imprégné de tradition, de rituels et d’un fort esprit de communauté.

Rejoignez-nous pour plonger plus profondément dans le fascinant royaume des esprits et découvrir la véritable essence du vodou haïtien.

Combien de dieux y a-t-il dans le vodou haïtien ?

En réalité, il n’y a ni dieux ni déesses dans le vodou. Il n’y a pas non plus d’anges ou de démons. En général, les pratiquants du vodou s’accordent sur l’existence d’une entité supérieure qu’ils appellent souvent « Bondye » ou « Granmet. » Tout ce qui vit et respire est placé sous son autorité suprême. Cependant, la vie quotidienne et les croyances du pratiquant du vodou sont placées sous l’égide d’entités particulières : les Loas.

Rèn Kongo
Photo: Verdy Verna

Alors, que sont ces Loas ?

Pensez à eux comme des intermédiaires entre Dieu et nous, les mortels. En fait, les pratiquants du vodou voient les Loas comme des énergies puissantes qui s’occupent de nos affaires quotidiennes, tandis que Bondye reste en retrait. Certes, appeler Bondye le « Dieu du vodou » est un peu inexact, mais cela ne change rien à l’importance des esprits dans la vie des pratiquants. Ce sont eux qui sont honorés lors de toutes ces cérémonies et rituels dont vous avez peut-être entendu parler.

Vous ne trouverez pas de Bible sacrée du vodou qui répertorie toutes les divinités, car le vodou est une spiritualité complexe et dynamique. Les esprits du vodou haïtien sont enracinés dans les cultures africaines, caribéennes et autochtones, telles que celles des Taïnos, du royaume du Dahomey et du Congo.

Certains pratiquants vous diront qu’il existe 401 nasyon (familles de Loas), tandis que d’autres mentionneront 101 ou 21 nasyon. C’est une manière de dire qu’il y a de nombreux Loas, connus et inconnus.

Pour vous aider à y voir plus clair, voici une liste des Loas les plus connus.

Papa Legba
Photo: Verdy Verna

Papa Legba

Commençons par Papa Legba, le gardien de la porte du monde des esprits et celui qui dévoile les secrets du vodou. Connu comme un Loa farceur, il est souvent représenté comme un vieil homme s’appuyant sur une béquille, accompagné d’un ou plusieurs chiens. Lors des cérémonies vodou, il est le premier à être invoqué, car c’est lui qui ouvre le portail spirituel qui sépare les Loas de notre monde physique.

De plus, Papa Legba est le gardien des portails, des portes et des carrefours, et il est connu sous plusieurs noms, tels que Atibon Legba, Legba Met Kafou et Legba Potay. Son rôle est essentiel dans tout rituel vodou, car c’est lui qui accorde l’accès aux autres Loas et leur permet de se manifester pendant la cérémonie.

Danmbala Wèdo & Ayida Wèdo
Photo: Verdy Verna

Damballah Wèdo et Ayida Wèdo

Voici Damballa Wèdo et Ayida Wèdo – le couple divin ultime. Ils symbolisent l’équilibre parfait et l’harmonie de toute la création, représentant à la fois les énergies masculines et féminines. Ensemble, ils sont souvent représentés sous la forme de deux serpents entrelacés, illustrant l’union de leurs esprits.

Damballa est la force originelle de la création, considéré comme la voix intérieure de Dieu. Il est la source de toute sagesse et de tout savoir, et il représente le serpent de la terre et de l’horizon.

Ayida, quant à elle, est l’arc-en-ciel, le serpent du ciel. Elle apporte la pluie à la terre et lui rend sa beauté. Ensemble, Damballa et Ayida sont la source de la vie et de la sagesse. Leur symbole des serpents entrelacés apparaît souvent sur les tambours vodou, les meubles et même sur le poto mitan (le poteau central d’un péristyle).

Ayizan Velekete
Photo: Verdy Verna

Ayizan Velekete

Ayizan Velekete, une vieille femme sage qui arpente les routes avec sa fidèle canne, est bien plus qu’une simple figure. Elle est la gardienne du commerce et de l’économie, connue pour sa sagesse ancestrale et son esprit pur. Son regard bienveillant veille sur les activités commerciales et les routes, et les pratiquants du vodou l’invoquent souvent pour réussir dans leurs affaires.

En tant qu’épouse de Papa Loko, ils œuvrent ensemble pour assurer la pureté et le respect de la tradition vodou. Son arbre préféré est le palmier, symbole de royauté, bien qu’elle soit souvent représentée comme une vieille femme astucieuse.

Papa Loko
Photo: Verdy Verna

Papa Loko

Papa Loko est un Loa puissant, et son importance est magnifiquement illustrée dans une chanson folklorique haïtienne populaire, interprétée avec brio par Toto Bissainthe : « Papa Loko ou se van, pouse n ale nou se papiyon » (Papa Loko, tu es le vent, nous poussant, et nous devenons des papillons).

En tant que gardien des temples vodou (appelés hounfour), il est responsable de la préservation de la tradition vodou et de la transmission de la sagesse aux nouveaux initiés, qu’ils deviennent prêtres ou prêtresses vodou. Il est grandement respecté et souvent honoré par les pratiquants, qui utilisent son asson (hochet) lors des rituels.

Mais ce n’est pas tout – avec sa vaste connaissance des plantes médicinales et des remèdes naturels, Papa Loko est également un loa guérisseur, capable d’aider ceux qui ont besoin de guérison physique, émotionnelle ou spirituelle.

Kouzen Zaka
Photo: Verdy Verna

Kouzen Zaka

Connu comme le loa fermier par excellence, Kouzen Zaka est adoré par les communautés rurales pour sa capacité à assurer une récolte abondante et la prospérité dans les champs. Il est souvent représenté portant un chapeau de paille, une machette et un djakout (sac en fibres tressées). Célébré chaque 1er mai lors de la fête de l’agriculture et du travail, il est réputé pour combattre la paresse et l’oisiveté.

Kouzen Zaka est un ami des travailleurs acharnés, leur accordant la réussite dans leurs efforts. Il est souvent associé à Saint Isidore de Séville et aime tous les Haïtiens, qu’ils soient vivants ou morts. Avec une version enfantine de lui-même appelée Ti-Zaka dans certaines lignées, ce Loa attachant incarne l’importance de valoriser le pouvoir du travail acharné.

Mèt Agwe Tawoyo
Photo: Verdy Verna

Mèt Agwe

Esprit puissant des océans, Met Agwe Tawoyo est le souverain et le gardien de ses richesses. Il est souvent comparé au dieu grec Poséidon et est adoré par les pêcheurs et les marins pour sa générosité. Sa résidence mythique, Nan Zile, serait cachée dans les profondeurs de la mer.

Lors des rituels vodou, ceux possédés par Mèt Agwe se tournent souvent vers la mer, reconnaissant ainsi sa puissante présence. Il est marié à Mambo La Sirène, la sirène haïtienne, et ensemble, ils règnent sur un large groupe d’esprits dans le panthéon vodou.

Manbo Lasirèn Dyaman
Photo: Verdy Verna

Manbo Lasiren Dyaman

Dans le monde du vodou haïtien, la déesse sirène de la mer, Lasirèn, règne en maître. Avec sa forme séduisante mi-femme, mi-poisson, elle incarne la richesse et l’abondance de l’océan et est vénérée comme une puissante loa capable d’accorder prospérité et bonne fortune à ses fidèles.

En tant qu’épouse de Met Agwe, elle règne avec lui sur le vaste royaume des océans. Selon la culture haïtienne, quiconque trouve son peigne deviendra maître d’une immense richesse. Mais attention, Lasirèn n’est pas seulement un esprit bienveillant. Lorsqu’elle est en colère, elle peut se montrer capricieuse et dangereuse. Sous sa forme alternative de Labalenn, la baleine, elle peut se manifester comme une force puissante de force inconsciente.

Erzulie Freda
Photo: Verdy Verna

Erzulie Freda

Erzulie Freda, Loa haïtienne de l’amour, de la beauté et de la prospérité, peut être comparée à la déesse grecque Aphrodite. Elle est une puissante esprit, connue pour sa vanité et sa nature timide. Pour l’accueillir lors des rituels, les pratiquants doivent la traiter avec les honneurs dus à son statut de grande dame. Elle adore les parfums enivrants, les bijoux, et tout ce qui touche à la beauté et à la coquetterie.

Elle est considérée comme un esprit généreux, comblant ses fidèles de dons matériels et spirituels ainsi que d’amour, mais elle peut aussi se montrer capricieuse, difficile et même cruelle. Freda est souvent invoquée par des hommes en quête de prouesse sexuelle ou de richesse, et elle est fréquemment assistée par sa « sœur », l’esprit Petwo, Ezili Danto.

Erzulie Dantò
Photo: Verdy Verna

Erzulie Dantò

Aussi connue sous le nom de Mami Dantò, Erzulie Dantò est une figure maternelle puissante et protectrice dans la tradition vodou. Souvent représentée avec un couteau, elle symbolise la justice et combattra avec force pour protéger ses enfants, qui sont ses fidèles loyaux. Elle est une mère célibataire, une paysanne haïtienne farouchement indépendante, qui prend soin des siens.

L’esprit Erzulie Dantò est forte et déterminée à subvenir aux besoins de ses enfants. Malgré son apparence sévère, elle est profondément attentionnée et dévouée à ses enfants, et ne reculera devant rien pour les protéger. Elle est également la gardienne et protectrice des orphelins, des enfants malades et de ceux qui ont été maltraités.

Ogou Feray
Photo: Verdy Verna

Ogou

Le puissant loa guerrier, Ogou, incarne l’esprit combatif. Tout comme les dieux de la guerre romains, Mars et Jupiter, il inspire respect et crainte à ses fidèles. En tant que protecteur et gardien de son peuple, Ogou est associé au feu, à l’épée et à la guerre.

Il est une divinité féroce et redoutable avec plusieurs formes, dont Ogou Feray, Ogou Batala et Ogou Badagri. Chaque esprit Ogou possède des caractéristiques et attributs distincts, mais tous partagent un amour pour la guerre, l’épée et le travail de la forge. Avec son énergie puissante et sa discipline rigide, Ogou est le guide idéal pour ceux qui cherchent à surmonter leurs peurs et à devenir des versions plus fortes et meilleures d’eux-mêmes.

On dit qu’Ogou incarne l’esprit guerrier de l’ancien empire d’Oyo en Afrique de l’Ouest, et son vèvè est le totem des empereurs et rois qui ont succédé à Abiodun, roi du peuple Oyo.

Met Kafou
Photo: Verdy Verna

Met Kafou

Si vous avez le courage d’invoquer Met Kafou, préparez-vous à une épreuve de volonté, de détermination et de discipline. Ce redoutable loa est le maître de la magie noire et de la sorcellerie, et il ne dispense pas ses faveurs à la légère. Cependant, si vous parvenez à prouver votre valeur, Met Kafou peut vous accorder un immense pouvoir et une grande sagesse.

Mais soyez prudent: ses dons viennent avec un prix élevé, et il n’hésitera pas à le réclamer. Si vous êtes prêt à prendre ce risque, avancez avec précaution et marchez prudemment, de peur de devenir la proie des forces puissantes qui guettent.

Bawon Samdi
Photo: Verdy Verna

Bawon Samdi et les Gede

Également connu sous le nom de Baron Samedi, il est le chef du groupe des Loa Gede, les esprits des morts dans la tradition vodou. Il est le gardien de la barrière entre les vivants et les morts et est responsable de s’assurer que les âmes des défunts passent en toute sécurité dans l’au-delà.

Il est souvent représenté comme une grande silhouette sombre, vêtue d’un chapeau haut de forme, d’un smoking noir et de lunettes de soleil, avec un crâne à la place du visage. Bawon Samdi est connu pour son caractère espiègle et joueur, mais il ne faut pas le prendre à la légère, car il détient le pouvoir de la vie et de la mort entre ses mains.

Il est souvent invoqué lors des rituels pour communiquer avec les défunts, et on dit qu’il a le pouvoir de guérir les malades et de protéger contre les esprits maléfiques. Les Gede incluent également d’autres puissants Loas tels que Baron Lacroix, Baron Kriminel, Gede Nibo, Papa Gede et Gede Mazaka, chacun ayant sa personnalité et ses pouvoirs uniques.

Découvrez-en plus sur Fèt Gede, la célébration haïtienne du jour des morts qui honore les esprits Gede, et consultez les photos d’une célébration de Fèt Gede à Gonaïves.


Rédigé par Costaguinov Baptiste.

Publié en février 2023.


Comment assister à une cérémonie vaudou en Haïti

un groupe de personnes rassemblées autour d'une bougie et d'un cosmogramme dessiné au sol
Une cérémonie vaudou
Photo: Pierre Michel Jean

Comment participer à une cérémonie vaudou en Haïti

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Il ne fait aucun doute que le vaudou est une tradition spirituelle puissante. La première république noire libre au monde a vu le jour, en partie grâce à l’esprit unificateur du vaudou. Le vaudou a servi de fil conducteur, unissant les leaders de la révolution haïtienne, malgré l’absence de langue commune, de liens tribaux ou de pays d’origine partagé. En l’espace de quelques années seulement, dans un exploit apparemment miraculeux et contre toute attente, une armée d’esclaves s’est libérée de ses chaînes, a renversé le gouvernement colonial français, vaincu la marine de Napoléon, aboli l’esclavage et fondé Haïti telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Aujourd’hui, peut-être pas en dépit, mais grâce à ces racines puissantes, le vaudou est sans doute la tradition spirituelle la plus calomniée, redoutée et mal comprise dans le monde occidental. Il est temps de rétablir la vérité. La meilleure façon de rendre hommage aux combattants de la liberté et de dissiper les mythes est peut-être d’assister à une cérémonie vaudou en Haïti et de voir par vous-même.

Voici comment faire.

un tambourineur à la chemise ouverte et à la poitrine en sueur
Un tambourineur lors d’une cérémonie vaudou
Photo: Franck Fontain

Découvrez la danse vaudou

Les rassemblements sacrés vaudous peuvent porter de nombreux noms, souvent appelés cérémonie, rituel ou danse. En créole haïtien, les pratiquants du vaudou désignent souvent l’événement par le terme danse (dans). Dans ce guide, les termes danse et cérémonie seront utilisés de manière interchangeable.

Renseignez-vous à l’avance sur qui et quoi la danse sera dédiée

Il peut être utile de demander à qui la danse sera dédiée et dans quel but, le cas échéant. Par exemple, un lwa (esprit) spécifique est-il invoqué ? Si la cérémonie se déroule au début du mois de novembre, elle sera probablement organisée en l’honneur des lwa Gede et du Jour des Morts. Rappelez-vous que les divinités Petwo sont la contrepartie fougueuse et offensive des divinités Rada, plus douces et protectrices. Cette distinction peut vous aider à anticiper le ton du rituel.

Si c’est votre première fois à une cérémonie vaudou, il est recommandé d’assister à une danse Rada, notamment parce que vous aurez moins de chances d’y voir un sacrifice animal. Par exemple, vous pourriez participer à une danse printanière organisée pour accueillir une saison de récoltes abondantes, de chance et de bonne santé. Vous pourriez commencer par une danse Rada dédiée à Erzulie Freda, la déesse de l’amour et de la sensualité, ou à La Sirène, la déesse sirène de la chance, de la fertilité et de l’abondance matérielle.

Les rites, les dévotions et le style général des cérémonies varient considérablement selon la région d’Haïti où vous assistez à la danse. Par exemple, Papa Legba et les esprits jumeaux appelés Marassa sont honorés à travers des rites spécifiques incluant certains rituels, danses, rythmes de tambour, offrandes, prières et cosmogrammes tracés au sol. Cependant, les interprétations d’une danse pour Legba ou Marassa à Cap-Haïtien seront différentes de celles organisées à Jacmel. Cela s’applique à tous les rites et rituels dans les divers temples vaudous à travers Haïti.

Découvrez-en plus sur les différents dieux et déesses du vaudou ici !

une femme haïtienne âgée vêtue d'une robe rouge ornée de paillettes bleues
Une femme lors d’une cérémonie vaudou
Photo: Pierre Michel Jean

Préparez-vous à y passer un bon moment

Une danse vaudou peut durer très longtemps. À Jacmel, par exemple, les tambourineurs, alimentés par le rhum, qui lancent une cérémonie au crépuscule, peuvent encore être en train de jouer à l’aube — bien que leurs mains soient gonflées et meurtries. Comme pour toute danse dans une ville étrangère, apportez beaucoup d’eau et ne vous attendez pas à une heure précise pour la fin. Si vous souhaitez partir au milieu de la danse, prévoyez une stratégie de sortie : venez avec quelqu’un de confiance qui sera flexible pour partir quand vous serez prêt, adressez vos respects à l’hôte qui vous a invité si possible, puis partez simplement quand vous le souhaitez.

extérieur d’un temple vaudou avec un mur peint à la main représentant des esprits
Péristyle vaudou dans l’Artibonite
Photo: Emily Bauman / Amanacer

À quoi ressemble un temple vaudou

Les danses vaudou ont lieu dans un péristyle : un temple, généralement de forme ronde, toujours doté d’un poteau central appelé poto mitan, représentant le nombril de l’univers. En Haïti, de nombreux temples vaudous sont à la fois intérieurs et extérieurs, tandis que d’autres sont entièrement fermés ou complètement ouverts au ciel. Certains rituels sacrés se déroulent près de cascades, comme celle de Sodo, ou à proximité d’un arbre sacré mapou. Cependant, pour les besoins de ce guide, nous supposerons que vous assisterez à une cérémonie dans un péristyle.

Au centre de l’espace cérémoniel, vous verrez un autel. Les bouteilles représentent des cadeaux et des offrandes. Les machettes symbolisent l’honneur et le respect envers les entités du monde des esprits.

Laissez vos bagages culturels à la porte

Sur l’autel, vous pourriez également voir des crânes et d’autres restes humains. Alors que le monde occidental associe les os à la mort, à la nécromancie et à une imagerie kitsch d’Halloween, il est important de comprendre que, dans le vaudou, les crânes ont une signification presque opposée. Essayez de voir dans le crâne la présence réconfortante d’un ancêtre ou l’équilibre entre la vie et la mort.

Tandis que les cultures occidentales tendent à éviter la mort et à la reléguer hors du foyer familial, garder les défunts proches est une pratique essentielle dans des cultures allant de la Roumanie à l’Indonésie en passant par Haïti. Dans le vaudou, la mort n’est pas dissimulée au quotidien, mais plutôt intégrée dans les cérémonies comme un moyen d’apprécier et de célébrer pleinement la vie.

Les ancêtres et les membres de la famille décédés peuvent être invités à se joindre à la danse. Ceux qui sont partis reviennent parmi la communauté pour offrir des conseils et participer aux rituels. Plutôt que de voir cela comme une hantise, envisagez-le comme une magnifique réunion de famille.

Lorsque vous assistez à une cérémonie vaudou, il est judicieux d’aborder l’expérience avec un esprit vierge, détendu et ouvert, prêt à apprendre. Laissez vos bagages culturels à la porte et profitez pleinement de cette expérience totalement nouvelle !

un groupe de pratiquants vaudou vêtus de blanc
Danse lors d’une cérémonie vaudou
Photo: Franck Fontain

Portez une tenue élégante, mais évitez le blanc !

Ce que vous portez est important ! Une tenue de style business casual est appropriée. Évitez les T-shirts voyants ou les vêtements abîmés ou usés. Les hommes peuvent opter pour un jean et une chemise à manches courtes, et les femmes pour un jean et un chemisier. L’objectif est de choisir une tenue élégante mais respectueuse, sans bijoux extravagants. Les danses en milieu rural seront généralement plus décontractées.

La couleur est un élément clé à prendre en compte. La pureté du blanc revêt une grande importance lors des danses et est réservée aux pratiquants vaudous, il est donc préférable d’éviter de porter du blanc à tout rituel vaudou. Les motifs et les couleurs sont acceptables, mais attention aux foulards colorés ! Continuez à lire pour découvrir pourquoi.

Il est utile de se rappeler qu’Haïti peut être remarquablement chaud à presque toutes les périodes de l’année, et parfois même la nuit. Le lin et le coton seront vos meilleurs alliés, que vous prévoyiez d’assister à une cérémonie en ville ou en milieu rural.

Apportez une offrande

Bien qu’une danse vaudou ne soit pas un dîner mondain, il est approprié d’apporter une offrande d’alcool. Le vin ne sera pas le choix préféré de l’hôte dans ce cas. Demandez si vous pouvez offrir un litre ou un demi-gallon de rhum non raffiné, appelé kleren. Vous pouvez l’acheter localement et à bas prix presque partout en Haïti, mais le geste est important et sera apprécié, en particulier dans les milieux ruraux. Le kleren est le carburant de nombreuses danses vaudou, offert tant aux esprits qu’aux sèvitè (serviteurs des esprits). Les tambourineurs, qui jouent souvent toute la nuit jusqu’à l’aube, seront particulièrement reconnaissants.

un prêtre vaudou et un praticien effectuant une danse
Un ougan lors d’une cérémonie vaudou
Photo: Pierre Michel Jean

Le début de la danse

Une série de prières, parfois d’origine catholique romaine, marque le début de la cérémonie. Les esprits vaudous qui servent de gardiens sont salués avec les honneurs, offrandes et invocations appropriés. Lorsqu’il s’agit d’invoquer les fougueux lwa Petwo, les voudiwizans peuvent utiliser des coups de fouet, des sifflets, de l’essence, et même de la poudre à canon enflammée pour attirer leur attention.

Qui dirige la danse ?

Vous pourrez identifier les initiés vaudou (les hommes et les femmes qui orchestreront la cérémonie) par leurs vêtements cérémoniels entièrement blancs. La plupart des initiés portent des jupes haïtiennes traditionnelles blanches, des chemises blanches amidonnées et un mouchoir blanc sur la tête. Certains peuvent porter des foulards colorés en satin. La couleur du foulard est associée au lwa servi ce jour-là, mais elle indique également le rang dans la hiérarchie du temple.

Mambo ou manbo est le terme désignant une prêtresse vaudou. Ougan est le terme pour un prêtre vaudou masculin. Les mambo et ougan sont des figures d’une grande autorité et respect au sein de la communauté, responsables d’intervenir dans une large gamme de difficultés sociales, allant de la maladie aux conflits familiaux, aux problèmes financiers, ou même simplement une série de malchances. En tant qu’intermédiaires entre les lwa et les humains, ils agissent comme des serviteurs qui restaurent la santé, l’harmonie et l’équilibre.

On croit que les tambours créent un passage vers le monde des esprits. C’est une invitation rythmique pour les lwa à assister à la danse qui est tenue en leur honneur. Un peu comme une station de radio, lorsque les tambourineurs s’accordent sur la fréquence FM spécifique du lwa, ce dernier commence à diffuser sur cette fréquence. Chaque lwa possède son propre rythme de tambour et des danses associées, et il peut aussi y avoir des variations entre les traditions : un rythme de tambour d’origine Dahoméenne est différent d’un rythme d’origine Congo. Les initiés peuvent passer toute une vie à perfectionner leur répertoire.

un cosmogramme tracé au sol avec une main tenant une bougie
Un vèvè tracé au sol d’un hounfour
Photo : Pierre Michel Jean

Les vèvè cosmogrammes

Vers le début de la danse, les pratiquants vaudou initiés traceront un cosmogramme vèvè sur le sol avec de la poudre blanche. Cela demande une grande maîtrise, précision et entraînement. Ces vèvè symétriques sont anciens et uniques à chaque lwa.

Une fois tracé avec une parfaite symétrie sur le sol du temple, un élément essentiel est en place permettant au lwa de descendre. Tout comme les rythmes de tambour uniques, les cosmogrammes uniques sont des signes d’appel, attirant un lwa particulier. En plus du vèvè tracé avec précision sur le sol, un drapeau orné de paillettes représentant le cosmogramme est suspendu dans un endroit d’honneur pour que tout le monde puisse le voir.

Découvrez l’art complexe des symboles vaudous avec notre guide visuel des vèvè du vaudou haïtien.

Les transes de possession

Si la danse est un succès, attendez-vous à voir une transe de possession. En créole, la personne possédée est appelée le chwal (cheval), qui sera « monté » par le lwa. Voici comment identifier un chwal:

Vous pourrez voir des personnes avec les pupilles dilatées, des comportements spasmodiques, apparemment hors de contrôle de leur corps, accomplissant l’impossible, comme marcher sur des charbons ardents. Il n’y a pas lieu de s’alarmer lorsque des individus se donnent entièrement à un lwa pour être dirigés de cette manière. Cela signifie que la cérémonie est un succès et représente l’accomplissement de rites et de pratiques complexes qui ont survécu à des centaines d’années de répression.

La transe est une opportunité pour l’esprit d’accomplir des guérisons à travers le chwal possédé. Des bénédictions peuvent avoir lieu, et c’est également l’occasion pour le lwa de réprimander ceux de la communauté qui ont besoin de se ressaisir et de changer leur comportement.

La transe de possession peut durer seulement quelques minutes ou plusieurs heures. Le chwal qui a donné son corps en service au lwa se réveillera probablement épuisé, sans se souvenir de ce qui s’est passé.

des personnes vêtues de blanc dansant et frappant des tambours lors d'un rituel vaudou
Tambours et danse lors d’une cérémonie vaudou
Photo: Pierre Michel Jean

Si vous avez peur du diable ou de la possession…

Mettez de côté les images issues de films d’horreur comme L’Exorciste ou les associations de possession avec des démons. Rappelez-vous plutôt que les personnes entrent volontairement dans la transe de possession. Peu importe ce qui se passe, souvenez-vous que le vaudou est pratiqué pour restaurer l’ordre, l’équilibre, la santé et l’harmonie dans la vie de ses pratiquants.

De nombreux non-pratiquants, tant en Haïti qu’à l’étranger, ont été amenés à associer le vaudou haïtien au mal, à la possession démoniaque et même au satanisme. Cela est assez ridicule et diffamatoire, car il n’existe même pas de figure de Satan dans le panthéon vaudou des esprits qui pourrait être adorée.

Les pratiquants du vaudou croient en un dieu suprême nommé Bondye ou Gran Met, qui est tout-puissant mais demeure distant. Il n’y a pas de contrepartie maléfique à Bondye, et comme le concept de « source » ou de « divinité », il n’est pas directement impliqué dans les affaires humaines. La multitude de lwa – esprits des ancêtres – servent d’intermédiaires, bien plus comparables aux saints de l’Église catholique qu’aux démons.

Vous avez toujours peur de vous faire posséder spontanément ? Lisez notre article Le Vodou haïtien dévoilé pour comprendre pourquoi cela ne se produira pas.

Le sacrifice d’animaux

Pour demander de la chance, les serviteurs des esprits peuvent faire un sacrifice sanglant. Des animaux tels que des coqs, des poules, des colombes, des cochons et des chèvres peuvent être abattus pendant la cérémonie. L’offrande peut être plus ou moins sanglante selon qu’il s’agit d’une offrande pour un esprit Petwo bosu (buffle) fougueux, par exemple, ou d’une cérémonie en l’honneur des doux jumeaux Marassa du rite Rada.

Pour les voyageurs occidentaux qui ont grandi en étant conscients des campagnes de PETA et du travail des activistes pour les droits des animaux, il peut être difficile d’imaginer que des rituels anciens vieux de 5 000 ans soient pratiqués en grande partie sans changement aujourd’hui. Si vous êtes préoccupé par votre réaction face à cette pratique ancienne, demandez des détails à l’avance afin de pouvoir décider si vous souhaitez y assister ou non.

des femmes haïtiennes âgées vêtues de rose avec une chaise sur la tête
Des femmes lors d’une cérémonie vaudou
Photo: Pierre Michel Jean

Faites vos recherches

Le Musée National d’Haïti à Port-au-Prince est un excellent endroit pour voir certains des tambours vaudous les plus anciens et historiques – certains datant des années 1500 ! Le Musée du Panthéon National Haïtien (MUPANAH), situé sur le Boulevard des Champs de Mars, présente une collection mettant en valeur les héros de la révolution de l’indépendance, ainsi que les outils qu’ils ont utilisés pour fonder la culture haïtienne moderne.

Juste au coin de la rue du Musée National se trouve le Bureau d’Ethnologie, un musée entièrement dédié au vaudou haïtien ! Si possible, visitez au moins l’un de ces musées avant de vivre votre expérience de cérémonie vaudou.

LGBTQ+ et Espaces Sûrs

Le travestissement, les identités trans et toutes les expressions de genre sont les bienvenues dans les communautés vaudou. Les relations et comportements homosexuels sont souvent acceptés sans question. Personne ne s’étonne – dans cet espace, du moins, ces identités minoritaires sont respectées en tant que serviteurs de la déesse de l’amour, Erzulie. Attendez-vous à ce que la danse soit un espace sûr. Vous pourriez voir des hommes en robes de femmes et bien d’autres choses encore.

pratiquants vaudous haïtiens lors d'une cérémonie
Un rituel Chire Aiyzan réalisé lors d’une cérémonie vaudou
Photo: Pierre Michel Jean

100 % Vaudou

La vérité est que même certains Haïtiens qui suivent les traditions protestantes ou catholiques et assistent à la messe le dimanche peuvent chercher des conseils auprès d’un mambo ou d’un ougan au cours de la semaine. En fait, un autocollant populaire à Port-au-Prince porte la phrase suivante : « Haïti, 80% protestant, 100% vaudouisant. » Pour les étrangers, cette pratique largement acceptée peut être difficile à comprendre. Pourtant, lorsqu’un membre de la famille tombe malade ou que les situations de vie deviennent critiques, cette flexibilité religieuse est courante. Elle fait partie du syncrétisme complexe de la culture haïtienne, où les choses sont multicouches et bien plus riches en significations qu’elles n’en ont l’air en surface. Certains pourraient même aller jusqu’à affirmer qu’on ne peut véritablement comprendre la culture haïtienne tant qu’on n’a pas pris part à une cérémonie vaudou.

À la fin de la journée, peu importe votre race, religion, orientation sexuelle ou pays d’origine, vous serez accueilli avec grâce et chaleur lors d’une cérémonie vaudou. Chacun est respecté, et la protection, la chance et les vœux de bonne santé sont offerts à tous ceux qui y assistent.

Qu’en dites-vous ? Peut-être qu’il est temps de danser…


Écrit par Emily Bauman.

Publié en janvier 2021.


Krik-krak ! – La tradition haïtienne de la narration

groupe d'Haïtiens assis sur des chaises et sur un porche dans une cour
Krik-krak à Cayes Jacmel
Photo: Anton Lau

Krik-krak ! (et tim-tim !)

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« Dans ma famille, nous sommes quatre, mais quand un de mes frères et sœurs n’est pas là, nous ne pouvons rien faire… » Connaissez-vous la réponse ?

Ce que vous venez de lire est un exemple d’une captivante tradition culturelle haïtienne connue sous le nom de kont, ou « contes ». La scène dans laquelle vous entendrez ces récits commence généralement au crépuscule, lorsque les enfants quittent la chaleur de leurs foyers familiaux pour se réunir dehors et faire ce que les Haïtiens appellent tire kont — « raconter des contes ». Ces contes ne sont pas vraiment des histoires, mais plutôt de petites charades, chacune plus amusante que la précédente, basées sur les détails et les petits objets de la vie quotidienne, et racontées dans un langage très coloré. La pratique du tire kont est souvent désignée sous les termes krik-krak! ou tim-tim! en raison de la formule d’appel et de réponse propre aux charades.

des garçons haïtiens assis à Port-au-Prince
Des garçons réunis pour la narration Krik-krak à Bois Moquette
Photo: Franck Fontain

Comment fonctionne le krik-krak

Le conteur, celui qui connaît généralement la réponse à la charade, signale le début de celle-ci en criant « Krik ! » À cela, tout le monde répond : « Krak ! »

Lorsque le conteur dit « Krik« , il annonce : « Préparez-vous, j’ai quelque chose à vous faire deviner. » Après que les gens aient répondu « Krak ! », le conteur poursuit : « Tim tim ? » et l’assemblée répond : « Bwa chèch. »

« Je suis peut-être petit, mais j’ai honoré les plus grands hommes. »

À ce moment-là, c’est à la personne la plus rapide de répondre. Les suggestions fusent de tous les coins : bougie ? Stylo ? Carnet ? Et si personne ne connaît la réponse, tout le monde avoue sa défaite en disant : « Mwen bwè pwa. » Alors, et seulement alors, le conteur révèle la réponse à l’énigme. Le krik-krak est une pratique communautaire qui en dit long sur le mode de vie des Haïtiens. Le conte, tout comme la musique et la littérature, contribue à maintenir la langue créole vivante et dynamique.

La pratique du krik-krak / tim-tim est héritée des ancêtres des Haïtiens en Afrique. Dans So Spoke the Uncle, Jean Price-Mars explique que des pratiques similaires apparaissent dans d’autres pays où la majorité de la population descend d’Afrique, comme la Guadeloupe, et que la même formule krik-krak est encore en usage dans certaines régions d’Afrique.

Aux côtés des devinettes, il existe également des histoires racontées aux enfants et aux adultes qui suivent la même formule, et qui participent à la transmission des valeurs collectives et morales de la communauté haïtienne. Certaines histoires, comme Tezin et Ti Soufri, sont largement répandues à travers Haïti. Tout comme les fables et les contes de fées, ces récits portent des leçons morales et reflètent les mœurs sociales.

groupe d'Haïtiens assis sur des chaises et sur un porche dans une cour
Krik-krak à Cayes Jacmel
Photo: Anton Lau

La narration haïtienne : en pleine croissance ou en train de disparaître ?

L’oralité occupe une place extrêmement importante en Haïti, au point que même le Vodou, la religion la plus populaire, se préserve principalement à travers des traditions orales, y compris une forme strictement orale de littérature appelée odyans. Le conte haïtien met en perspective les modes de vie de la classe inférieure et des habitants des campagnes, où des thèmes tels que la propriété, la mort, l’héritage et la famille refont souvent surface — des thèmes familiers dans les contes de fées européens, qui eux aussi se centrent souvent sur la classe ouvrière rurale. Bien que le rite social de raconter des histoires autour des feux de camp soit plus vieux que l’histoire elle-même, et que le jeu de devinettes haïtien en appel et réponse soit ancré dans les modes anciens de narration africaine, le krik-krak! se distingue comme un trésor unique de la culture haïtienne, et l’un qui reflète et co-crée la société haïtienne.

Cependant, puisque les kont se transmettent de génération en génération oralement, certaines histoires racontées rarement risquent de disparaître…

des garçons haïtiens assis ensemble en train de rire
Des garçons réunis pour la narration krik-krak à Bois Moquette
Photo: Franck Fontain

Il y a un festival Krik-krak! en mars, et vous êtes invité(e) !

Depuis 2009, un festival annuel de narration appelé Kont Anba Tonèl – le Festival Interculturel des Contes – est organisé à Port-au-Prince ainsi qu’à Jérémie et dans d’autres villes provinciales. Tenu chaque mois de mars, à partir de la Journée mondiale du conte (le 20 mars), ce festival vise principalement à mettre en valeur les modes de narration haïtiens, en maintenant la pratique du krik-krak! vivante. Et cela semble porter ses fruits – de plus en plus de comédiens se tournent vers une carrière de conteur professionnel, et certaines stations de radio récupèrent des fichiers audio de contes, les archivant pour les conserver et les transmettre aux générations futures que nous espérons voir continuer cette pratique.

Si vous visitez Haïti pendant les deux dernières semaines du mois de mars, vous pourrez assister au festival Kont Anba Tonèl et vous immerger dans une pratique ancestrale. Attendez-vous à entendre une multitude de contes, à assister à des conférences de collecteurs de contes professionnels, et à participer à des ateliers enseignant de nombreux modes de narration, y compris le krik-krak!. Sur ce sujet…

« Krik ? S’habille de pied en cap pour rester à la maison ? » « Krak ! Le lit, bien sûr… »


Rédigé par Melissa Beralus et traduit par Kelly Paulemon.

Publié en mai 2020.


Visitez un musée dédié au Vodou

grand bâtiment de musée décoré de peintures de serpents
Le Bureau d’Ethnologie, Port-au-Prince
Photo: Anton Lau

Visitez un musée dédié au Vodou

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Une visite au Bureau d’Ethnologie, un musée dédié au Vodou en Haïti, est l’une des principales choses à faire à Port-au-Prince.

Près du Champ de Mars, à l’angle de la Rue Magny et de la Rue Oswald Durand, ce musée vous permet de vous familiariser avec le Vodou et sa place dans la société haïtienne.

C’est l’endroit idéal pour commencer l’exploration des « lwa » et des nombreux rythmes et nuances du Vodou. À l’intérieur, vous trouverez des artefacts Vodou, des œuvres d’art et des anecdotes de recherches anthropologiques sur les traditions Vodou (aussi orthographiées Vodoun et Vaudou). La plupart des expositions sont décrites en français.

Statue en bronze d'un Indien Taïno dans la cour du musée
Statue Taïno au Bureau d’Ethnologie, Port-au-Prince
Photo: Anton Lau

À propos de la collection

Les façades extérieures du Bureau National d’Ethnologie abritent une exposition permanente de photographies sur plusieurs aspects de la vie et des activités de la société haïtienne : des scènes du carnaval national haïtien, des rituels Vodou, des danses folkloriques imprégnées de Vodou et bien plus encore.

L’intérieur propose également une exposition de photographies captivante montrant des scènes de coutumes sociales et culturelles spécifiques à la nation haïtienne, y compris des costumes nationaux et leurs histoires. Les artistes haïtiens y sont également représentés, accompagnés de supports interprétatifs (principalement en français). Des concepts spirituels clés, allant du « lakou mansson » de Léogâne (créole haïtien : Leyogàn) au « lakou Badjo, Soukri, Souvenance » des Gonaïves, sont illustrés avec des explications sur leur importance dans la société haïtienne.

Fondé en 1941 par le romancier haïtien Jacques Roumain et dirigé aujourd’hui par Erol Josué, le musée a pour mission la préservation et la classification de tous les artefacts anthropologiques trouvés du côté haïtien de l’île d’Hispaniola, y compris la protection et l’organisation d’excursions vers des sites archéologiques importants. Il est possible pour les visiteurs de participer à certaines de ces excursions – il suffit de demander lors de votre arrivée au musée.

Statue en bronze de sanglier
Statue au Bureau d’Ethnologie, Port-au-Prince
Photo: Anton Lau

Comment s’y rendre

Signalé sous le nom de Bureau National d’Ethnologie, le Bureau d’Ethnologie se trouve à l’angle de la Rue Magny et de la Rue Oswald Durand, près du Champ de Mars, en plein cœur du centre-ville de Port-au-Prince.


Rédigé par Jean Fils.

Publié en septembre 2019


Vivez le Rara de Pâques

groupe d'Haïtiens marchant en jouant des trompettes lors des festivités de rara
Groupe de Rara à Bois Moquette
Photo: Franck Fontain

Vivez le Rara de Pâques

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Bienvenue en Haïti et à son Rara de Pâques unique en son genre!

Haïti étant majoritairement catholique, vous verrez une grande effervescence dans les églises à l’approche de Pâques, certaines organisant même des marches à travers leurs paroisses : certaines à Pétion-Ville, d’autres à Lalue ou encore à Thomassin. Pour les fidèles, c’est une période de l’année qui ne passe jamais sans célébration.

Si vous y prêtez attention, vous remarquerez toutefois qu’une autre forme de célébration a lieu – et ce n’est pas une célébration catholique.

femmes haïtiennes en décorations de carnaval avec des trompettes
Groupe de Rara jouant sur des vaksins
Photo: Kolektif 2 Dimansyon

Histoire

À l’époque coloniale, dès leur débarquement des navires de commerce sur l’île, les esclaves durent se battre pour tout : leur survie, leur liberté et leur culture. Comme les deux premiers combats étaient plus ardus et plus fondamentaux, ils durent les mener chaque jour jusqu’à la conquête de l’indépendance.

Les cultures et les langues qu’ils avaient apportées avec eux à travers les mers furent violemment réprimées, et s’y accrocher était un défi pour des personnes déjà engagées dans une lutte pour leur survie et leur liberté. Les maîtres esclavagistes avaient pour objectif d’éradiquer toute pensée, toute idée ou tout comportement pouvant rappeler aux esclaves qu’ils étaient des êtres humains.

Lorsque les Espagnols colonisèrent l’île, ils y introduisirent le calendrier catholique, qui s’y imposa comme la norme. La classe esclave trouva un moyen de préserver ses croyances et pratiques spirituelles en réajustant ses propres traditions pour coïncider avec le calendrier catholique.

Tout au long du carême, les esclaves se réunissaient, mais pas pour décider de ce qu’ils allaient abandonner. Ils se rassemblaient pour récupérer quelque chose : les traditions musicales de leurs terres natales, qu’ils ne pouvaient normalement pas risquer sous l’œil vigilant des maîtres esclavagistes. Pendant le carême, les musiciens se retrouvaient pour jouer ensemble, adaptant les instruments, traditions et récits coutumiers à leur nouvelle vie. Tard dans la nuit, se rencontrant dans des endroits isolés, ils trouvaient des moyens de célébrer leur culture dans toute sa vivacité, sa puissance et sa raucité. Le Vodou faisait souvent partie de cette célébration. En fusionnant la musique et le Vodou, une culture et une religion renouvelées et nouvellement unifiées virent le jour.

C’est ainsi qu’est née le rara, une tradition qui reste vivante et bien ancrée dans le Haïti moderne, et qui investit les rues avec plus d’audace que jamais.

groupe d'Haïtiens marchant en jouant des trompettes lors des festivités de rara
Groupe de Rara défilant à Bois Moquette
Photo: Franck Fontain

Comment vivre le rara de Pâques

Si vous séjournez en Haïti pendant Pâques, les performances des groupes de rara commencent généralement autour du Mercredi des Cendres et se terminent en beauté le dimanche de Pâques. La liste des artistes n’est jamais annoncée publiquement, mais vous pouvez les voir jouer, danser, rire et courir dans les rues de Port-au-Prince, Cap-Haïtien, Jacmel, Jérémie et bien d’autres endroits.

Le son d’un groupe de rara est inconfondable. Un rythme entraînant de tambours, surmonté d’une mélodie jouée sur quelques vaksins, une trompette traditionnellement fabriquée en bambou creusé, mais plus souvent en métal. Vous entendrez le grattement rapide du graj, accompagné des voix fortes et régulières des gens qui chantent, frappent du pied et dansent dans la rue.

Comme le disait Martin Mull, écrire sur la musique, c’est comme danser à propos de l’architecture. L’esprit du rara est impossible à capturer par des mots, alors vous devrez venir le découvrir par vous-même.


Rédigé par Kelly Paulemon.

Publié en juillet 2019