Fêtes & Célébrations

Festival de cerfs-volants Festikap

trois garçons haïtiens faisant voler un cerf-volant
Festival Festikap, La Vallée de Jacmel
Photo: Franck Fontain

Festival de cerfs-volants Festikap

Copy LinkEmailFacebookShare

Imaginez ceci : Après une semaine d’aventure à travers Haïti – entre randonnées, road-trips, plages et cascades cachées – il est temps de célébrer la nouvelle année. Vous choisissez de vous rendre à Jacmel pour admirer les feux d’artifice sur la plage. Le lendemain, vous glissez une nappe de pique-nique dans la voiture, prenez la route vers La Vallée, et contemplez un ciel rempli de cerfs-volants en savourant un bon repas et quelques boissons. Vous pouvez même tenter l’expérience en faisant voler votre propre cerf-volant, avec l’aide des autres participants ou des organisateurs du festival.Il vous faudra un peu moins de 300 gourdes (environ 3 USD) pour acheter un beau cerf-volant et participer à cette fête colorée.

Comme vous pouvez acheter un cerf-volant sur place, il est facile de se laisser tenter, ce qui fait du Festikap une aventure spontanée parfaite ! Le festival a lieu chaque 2 janvier, ce qui en fait l’activité idéale pour tous ceux qui prévoient de passer le réveillon à Jacmel (ou même à Port-au-Prince).

L’ambiance du Festikap est comparable à celle du Champ-de-Mars en février pendant le carnaval. Des cerfs-volants aux couleurs éclatantes et à la créativité débordante envahissent le ciel pendant des heures : une véritable exposition d’art en plein vol. Avec les enfants qui courent partout, les aînés qui observent et les plus jeunes qui s’adonnent au plaisir de faire voler leurs cerfs-volants, l’atmosphère à La Vallée ressemble à une grande excursion en plein air.

Dans les coulisses de la magie

Le célèbre festival de cerfs-volants de La Vallée de Jacmel – ou simplement « La Vallée » comme l’appellent les habitants – célébrera son 10ᵉ anniversaire l’année prochaine. Le Festikap est un événement organisé par l’Organisation Universitaire de Jeunes Valléens pour le Progrès avec pour objectif de préserver une tradition profondément ancrée dans la culture haïtienne, mais menacée par l’oubli et l’abandon. Ce festival annuel offre une porte d’entrée unique vers la belle communauté de La Vallée de Jacmel. Les festivités ont lieu chaque 2 janvier, une date idéale puisque c’est un jour férié en Haïti : la Journée des Aïeux.

Faire voler des cerfs-volants est une tradition essentielle de la culture haïtienne. Dès le mois d’avril, sur les toits des maisons à travers tout le pays, on peut apercevoir des enfants, leurs parents et parfois même leurs grands-parents, tirant sur de fines ficelles presque invisibles, attachées à des cerfs-volants fabriqués avec les moyens du bord. La plupart sont faits de plastique, souvent du même type que celui utilisé pour vendre des papita ou des cacahuètes grillées – certains transparents, d’autres bleus, roses ou colorés. D’autres modèles, plus élaborés, sont fabriqués en papier brun avec des touches de rouge et de vert, des queues et des ornements soigneusement ajoutés. Ensemble, ils parsèment le ciel d’un bleu éclatant du début de l’été, formant des essaims tourbillonnants aux couleurs vives.

En préparation du Festikap, les organisateurs mettent en place des ateliers pour fabriquer un certain nombre de cerfs-volants qui seront exposés le jour du festival. Mais cet événement ne se limite pas à un simple loisir : tout le processus de préparation stimule la créativité et favorise l’engagement communautaire en rassemblant des publics variés. Le festival a pour ambition de raviver l’intérêt pour une tradition en voie de disparition : la fabrication et le vol des cerfs-volants. Les efforts déployés pour organiser le Festikap s’apparentent ainsi à un véritable mouvement visant à transmettre un savoir-faire et à préserver un patrimoine culturel fragile.

garçon haïtien en jean bleu avec un cerf-volant
Garçon avec un cerf-volant au Festival Festikap, La Vallée de Jacmel
Photo: Franck Fontain

Comment s’y rendre

La Vallée se situe à une heure de route au nord-ouest de Jacmel et à environ trois heures de route au sud-ouest de Port-au-Prince. Bien que son nom évoque une vallée encaissée et ombragée, la ville se dresse en réalité à une altitude d’environ 800 mètres (soit un demi-mile au-dessus du niveau de la mer) et offre une vue panoramique sur le sud d’Haïti. Une escapade à La Vallée est l’expérience idéale pour ceux qui recherchent plus qu’un simple week-end à la plage.

Le Festikap est une excellente façon de découvrir Haïti autrement et authentiquement. Si vous aimez les couleurs, la musique et l’esprit de communauté, c’est un événement incontournable à ajouter à votre itinéraire !


Rédigé par Kira Paulemon.

Publié en octobre 2019


Vivez le Rara de Pâques

groupe d'Haïtiens marchant en jouant des trompettes lors des festivités de rara
Groupe de Rara à Bois Moquette
Photo: Franck Fontain

Vivez le Rara de Pâques

Copy LinkEmailFacebookShare

Bienvenue en Haïti et à son Rara de Pâques unique en son genre!

Haïti étant majoritairement catholique, vous verrez une grande effervescence dans les églises à l’approche de Pâques, certaines organisant même des marches à travers leurs paroisses : certaines à Pétion-Ville, d’autres à Lalue ou encore à Thomassin. Pour les fidèles, c’est une période de l’année qui ne passe jamais sans célébration.

Si vous y prêtez attention, vous remarquerez toutefois qu’une autre forme de célébration a lieu – et ce n’est pas une célébration catholique.

femmes haïtiennes en décorations de carnaval avec des trompettes
Groupe de Rara jouant sur des vaksins
Photo: Kolektif 2 Dimansyon

Histoire

À l’époque coloniale, dès leur débarquement des navires de commerce sur l’île, les esclaves durent se battre pour tout : leur survie, leur liberté et leur culture. Comme les deux premiers combats étaient plus ardus et plus fondamentaux, ils durent les mener chaque jour jusqu’à la conquête de l’indépendance.

Les cultures et les langues qu’ils avaient apportées avec eux à travers les mers furent violemment réprimées, et s’y accrocher était un défi pour des personnes déjà engagées dans une lutte pour leur survie et leur liberté. Les maîtres esclavagistes avaient pour objectif d’éradiquer toute pensée, toute idée ou tout comportement pouvant rappeler aux esclaves qu’ils étaient des êtres humains.

Lorsque les Espagnols colonisèrent l’île, ils y introduisirent le calendrier catholique, qui s’y imposa comme la norme. La classe esclave trouva un moyen de préserver ses croyances et pratiques spirituelles en réajustant ses propres traditions pour coïncider avec le calendrier catholique.

Tout au long du carême, les esclaves se réunissaient, mais pas pour décider de ce qu’ils allaient abandonner. Ils se rassemblaient pour récupérer quelque chose : les traditions musicales de leurs terres natales, qu’ils ne pouvaient normalement pas risquer sous l’œil vigilant des maîtres esclavagistes. Pendant le carême, les musiciens se retrouvaient pour jouer ensemble, adaptant les instruments, traditions et récits coutumiers à leur nouvelle vie. Tard dans la nuit, se rencontrant dans des endroits isolés, ils trouvaient des moyens de célébrer leur culture dans toute sa vivacité, sa puissance et sa raucité. Le Vodou faisait souvent partie de cette célébration. En fusionnant la musique et le Vodou, une culture et une religion renouvelées et nouvellement unifiées virent le jour.

C’est ainsi qu’est née le rara, une tradition qui reste vivante et bien ancrée dans le Haïti moderne, et qui investit les rues avec plus d’audace que jamais.

groupe d'Haïtiens marchant en jouant des trompettes lors des festivités de rara
Groupe de Rara défilant à Bois Moquette
Photo: Franck Fontain

Comment vivre le rara de Pâques

Si vous séjournez en Haïti pendant Pâques, les performances des groupes de rara commencent généralement autour du Mercredi des Cendres et se terminent en beauté le dimanche de Pâques. La liste des artistes n’est jamais annoncée publiquement, mais vous pouvez les voir jouer, danser, rire et courir dans les rues de Port-au-Prince, Cap-Haïtien, Jacmel, Jérémie et bien d’autres endroits.

Le son d’un groupe de rara est inconfondable. Un rythme entraînant de tambours, surmonté d’une mélodie jouée sur quelques vaksins, une trompette traditionnellement fabriquée en bambou creusé, mais plus souvent en métal. Vous entendrez le grattement rapide du graj, accompagné des voix fortes et régulières des gens qui chantent, frappent du pied et dansent dans la rue.

Comme le disait Martin Mull, écrire sur la musique, c’est comme danser à propos de l’architecture. L’esprit du rara est impossible à capturer par des mots, alors vous devrez venir le découvrir par vous-même.


Rédigé par Kelly Paulemon.

Publié en juillet 2019